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Titre du blog : La Part des Anges by Trax Oberdorn
Auteur : La-part-des-anges
Date de création : 05-10-2008
 
posté le 08-01-2009 à 15:43:25

Chapitre 13 - Les souterrains

         

 

      En début de soirée, les quatre hommes se retrouvèrent dans les fourrés fâce au manoir du Brûle.

 

- Ferdinand, à vous de jouer, sourit Hubert, voilà un défi à votre hauteur: charmer la vieille Solange de La Coulombière. Faites de votre mieux pour l'éloigner de son salon pendant une heure dès que la nuit sera tombée. Le souterrain s'ouvre par une trappe juste devant la bibliothèque.

-Comment êtes-vous au courant de ce passage?

-J'ai eu autrefois quelques accointances avec sa plus jeune fille qui pensait m'attirer avec ce genre de confidence..

 

          Ferdinand réfléchit quelques minutes, mais ayant bien des difficultés à imaginer quelque plan que ce soit avec la vieille de La Coulombière, il décida d'y aller à l'instinct, se leva, rajusta sa tenue et se dirigea vers la porte d'entrée en grimaçant. es trois autres ne purent s'empécher de sourire en le voyant ainsi déambuler.

          Il sonna et se présenta de la plus courtoise des façons, il fallait bien ça avec Solange. Il réussit à se faire inviter assez rapidement. Méry conclut qu'il était décidément très fort à ce jeu.

 

- Méry, allez vous poster près de la fenêtre et prévenez-nous quand la voie est libre.

 

         Méry s'éxécuta tout en précisant qu'aussi efficace qu'il soit, Ferdinand avait quand même besoin d'une ou deux heures pour emballer un tel morceau. Solange de la Coulombière était veuve depuis une vingtaine d'années, et personne n'avait jamais plaint son mari d'être mort tant ela avait dû être une libération pour lui. Elle devait avoir près de 70 ans, mais son cratère acariatre avait préservé tout son tonus.

Méry les observa, occupés à discuter au coin du feu, non loin de la fameuse bibliothèque. Ferdinand s'était présenté à elle comme le fils d'un des meilleurs amis de son défunt mari, et elle se complaisait à lui raconter ses souvenirs. Méry pensa qu'il préférait pour l'instant sa placeà celle de Ferdinand: faire la cour à cette vieille femme peu aguichante lui aurait déplu.

          La nuit était tombée depuis une demie-heure quand Méry constata que Ferdinand et Solange n'étaient plus dans le salon et que la lumière d'une chambre à l'étage s'était allumée. Il n'en revenait pas et alla prévenir ses complices.

 

         A pas feutrés, ils pénétrèrent dans la maison, soulevèrent la trappe et se glissèrent dans le souterrain par une échelle verticale en mauvais état. Les pluies des derniers jours avaient rendu l'endroit incroyablement humide et suintant. Hubert et Lucas se mirent en route sans y faire attention, alors que Méry tentait d'éviter les profondes flaques de boue qui ponctuaient le boyau. La flamme de la torche qu'avait allumée Hubert ajoutait une odeur âcre de pétrole brulé aux éffluves nauséabondes des eaux usées qui s'infiltraient lorsqu'ils passaient sous une rue.

 

 Ils parcoururent ainsi deux à trois cent mètres et arrivèrent à un tournant où le souterrain était complétement inondé. Hubert jura à voix basse, et se rappelant les explications de la jeune file, il jugea que la traversée en apnée devait être possible. Lucas se porta volontaire, attachant une corde à son poignet, il s'immergea, non sans un frisson, dans les eaux noirâtres. Suivant les parois du tunnel de ses mains, il déboucha hors d'haleine dans une petite pièce au bout d'un long couloir faiblement éclairé. Il reprit son souffle le plus silencieusement possible se doutant qu'il était dans les murs de la prison et tira sur la corde. Les deux autres arrivèrent rapidement, Hubert le premier, toujours aussi sûr de lui, et Méry épouvanté par cette traversée angoissante sous l'eau. Constatant son manque de sang-froid, Hubert craignait de regretter sa présence.

 

           Lucas partit en avance reconnaître les lieux et, parvenu au bout du couloir, il s'aperçut que de la lumière venait d'une torche accrochée juste au-dessus du poste du garde dont O avait parlé. Le dit garde était occupé à vider une écuelle de haricots fumants.

Discret comme l'ombre, Lucas se glissa derrière lui une cordelette noire dans les mains. Il l'étrangla rapidement et sans lutte. Quand Méry et Hubert arrivèrent, il gisait au sol.

 

- Mort? questionna Méry

- Il a manqué d'air quelques secondes, il devrait s'en remettre, le rassura Lucas.

 

        Ils se hatèrent vers la cage d'Ursule, l'ouvrirent en silence alors qu'elle dormait. Elle se réveilla en sursaut, craignant une nouvelle persécution. Lucas derrière elle lui ceintura la taille et lui glissa à l'oreille un 'Aie confiance' qui la sécurisa à la seconde. Elle reconnut Hubert et dévisagea Méry qui semblait décomposé par la peur.

 

              Ils retournèrent au tunnel. Lucas se jeta à l'eau avec Ursule, il colla son visage contre le sien et lui murmura 'respire, je t'emmène'. Elle ferma les yeux, inspirant le plus qu'elle put et se laissa entrainer. Cet homme, elle l'aurait suivi même en Enfer.

Ils ressortirent à l'autre extrémité, Ursule presque morte d'asphyxie et Lucas épuisé par l'effort qu'il venait de fournir. Le souterrain était aussi obscure que le plus profond des abysses, la torche s'était éteinte, ce qui arrangeait bien Lucas. Il aurait été bien incapable de dissimuler son identité après une telle traversée. Tous deux assis contre le mur, il l'attira, la serrant contre lui. Hubert arriva à leur suite, mais Méry tarda..trop. Il avait pourtant tiré la corde, signe de son immersion. Hubert replongea, devinant le drâme.

Il revint et expliqua à Lucas que Méry était resté retenu par son habit à un crochet saillant du mur et n'avait pu se libérer. Il était mort.

 

- Ne nous attardons pas, Ferdinand nous attend.Ils rejoignirent le manoir et en sortirent prestement. Ferdinand  les rattappa dans les fourrés une demie-heure plus tard, après avoir épongé toute l'eau qu'ils avaient laissé dans le salon en sortant trempés du souterrain.

- Ta soirée avec la vieile Solange s'est bien passée?le nargua Hubert.

- A merveille, dit-il en riant, une forte dose de poudre à dormir l'a envoyée au septième ciel en quelques minutes! Où est Méry?

- Mort, répondit froidement Hubert.

 

Personne ne répliqua, choqué par le ton neutre avec lequel Hubert avait répondu. Ursule touchait nerveusement le lacet autour de son cou, chose que Lucas ne manqua pas de remarquer. Il demanda à Ferdinand de la raccompagner.

 

- Nous nous retrouverons à la Malfiance demain soir, ajouta Hubert avant de partir.

 

Trax Oberdorn